Philanthropie : consolider une relation de confiance CGP-client

Par : Benoît Descamps

Stéphane Dauge, directeur communication, relations bienfaiteurs et ressources de la fondation Apprentis d’Auteuil, revient sur l’étendue des missions de la fondation et comment elle accompagne les professionnels du patrimoine à intégrer un service de philanthropie.

Profession CGP : Pourriez-vous nous rappeler ce qu’est la fondation Apprentis d’Auteuil ?

Stéphane Dauge : Apprentis d’Auteuil est une fondation catholique, reconnue d’utilité publique depuis 1929, qui accompagne aujourd’hui 27 000 jeunes fragilisés et 5 800 familles pour restaurer un lien familial. Elle soutient les jeunes en difficulté à travers des programmes d’accueil, d’éducation, de formation et d’insertion en France et à l’international pour leur permettre de devenir des adultes libres et épanouis de demain. Depuis cent cinquante-trois ans, Apprentis d’Auteuil s’adapte pour relever les défis de son temps et développe ses actions pour agir au plus tôt et prévenir l’exclusion par l’éducation. Convaincu que c’est grâce à un accompagnement personnalisé qui tienne compte des besoins de l’individu que ce dernier peut s’épanouir, Apprentis d’Auteuil construit avec chacun le projet qui lui permettra de trouver sa place dans la société. Les parents restant les premiers éducateurs, notre fondation ne se substitue pas à leur autorité, mais les accompagne pour leur permettre de créer ou de recréer des liens solides avec leur enfant, à apprendre ou réapprendre les gestes éducatifs.

Pourriez-vous nous rappeler l’histoire de votre fondation Apprentis d’Auteuil ?

S. D. : C’est le 19 mars 1866 qu’a vu le jour l’œuvre de la Première communion, sous l’impulsion de l’abbé Roussel alors préoccupé par le sort des orphelins et des enfants abandonnés à Paris. Il loue dans le quartier d’Auteuil, au 40 rue Jean-de-La-Fontaine où réside toujours le siège de notre fondation, une maison et y emménage avec six enfants. Il souhaite que chacun d’entre eux soit accueilli, soigné, apprenne à lire et à écrire, reçoive une formation chrétienne et un métier. Cent cinquante-trois ans après, ce sont toujours les mêmes missions qui nous animent : accueillir et accompagner, proposer une éducation et une formation aux plus fragiles, pour en faire des citoyens libres.

Plusieurs personnalités se sont succédé à la tête de la fondation et l’ont fait évoluer au gré des besoins sociaux, parmi lesquelles le bienheureux père Daniel Brottier, missionnaire spiritain qui lui a donné un nouvel élan durant l’entre-deux-guerres et a fait édifier la chapelle Sainte-Thérèse, premier sanctuaire dédié à la jeune carmélite.

Outre celle d’insertion des jeunes, quelles sont vos autres missions ?

S. D. : La fondation exerce également une mission de protection de l’enfance avec chaque année plus de six mille enfants accueillis jusqu’à leur majorité ou la fin de leur formation professionnelle. Nous sommes également impliqués dans la lutte contre le décrochage scolaire. En effet, chaque année, ce sont 80 000 jeunes qui sortent de l’école sans diplôme et qui ont perdu toute appétence pour l’éducation « classique ». Un énorme gâchis ! Notre mission d’insertion professionnelle concerne non seulement les adolescents, mais aussi les jeunes de 18-30 ans, appelés Neets. Estimés à 1,7 million en France, ces jeunes sont sans emploi et sans formation. Nous les aidons à reconstruire un lien social. Enfin, nous avons une mission de soutien à la parentalité, qui nous conduit le plus souvent à accompagner des familles monoparentales au travers de foyers, de crèches. Nous avons lancé, en partenariat avec d’autres acteurs, des Maisons des familles, lieux d’accueil de jour permettant à des familles de reprendre confiance en recréant du lien social. Cette initiative est d’ailleurs soutenue par le groupe Primonial, avec qui nous avons obtenu le prix de la Philanthropie lors du Grand Forum. Au total, la fondation gère 240 établissements et dispositifs en France et en outre-mer. Notre action se porte au-delà de nos frontières puisque nous soutenons, en partenariat avec des associations locales, 25 000 jeunes et familles dans 32 pays. Ainsi, si la fondation compte 153 années d’existence, ce n’est pour autant pas une vieille dame. Au fil des années, elle a su faire preuve d’innovation et elle a démontré sa capacité, via son maillage territorial et ses relations avec les pouvoirs publics et des partenaires privés, à identifier les besoins sociaux et adapter ses dispositifs.

Comment vous financez-vous ?

S. D. : Notre budget de fonctionnement s’élève à 361 millions d’euros. 59 % de nos ressources proviennent des départements, régions et de l’Etat, notamment au titre de la protection de l’enfance. 41 % sont des ressources privées issues de la générosité du public et des philanthropes, de la participation des familles et du mécénat d’entreprise. Nous menons des actions avec ces entreprises ou co-construisons avec elles des dispositifs d’insertion professionnelle. Par exemple, avec le groupe FM Logistics, nous formons des jeunes aux métiers de la logistique. Pour les entreprises, le mécénat procure un moyen de donner du sens et d’impliquer ses collaborateurs ou de communiquer sa raison d’être auprès de ses clients. L’enfance, l’insertion professionnelle sont des champs d’action à forte résonance : la confiance peut sauver l’avenir, tel est notre credo. Il s’agit de lutter contre le fatalisme et les idées reçues. Les besoins sont présents et sont croissants, la fragilité de nos bénéficiaires est exacerbée par les fragilités de notre société. La diversité de nos sources de financement garantit notre autonomie et notre liberté d’action.

Pour autant, il semble que la philanthropie gagne du terrain en France…

S. D. : Tout à fait, nous observons un élan philanthropique en France, notamment des fortunes personnelles et familiales. Nous entendons de plus en plus souvent nos bienfaiteurs souhaiter redonner une partie de ce qu’ils ont reçu. Il y a une véritable volonté de s’opposer à ce qui paraît irrémédiable et à la fatalité. Le philanthrope souhaite donner une empreinte à son entreprise ou enrichir son histoire familiale, et être acteur.

Quel type de dons percevez-vous de la part des particuliers ?

S. D. : Il peut s’agir de legs classiques ou avec charge, de contrats d’assurance-vie, de donation temporaires d’usufruit… Les dons reçus ont malheureusement baissé l’an passé à cause de l’augmentation de la CSG, mais aussi du passage à l’IFI et des inquiétudes liées au prélèvement à la source. Aussi, depuis 2009, nous avons la possibilité d’abriter des fondations. Une équipe est dédiée à la création et au suivi de fondations abritées (22 actuellement, dont la moitié a été créée via des conseils en gestion de patrimoine), avec des montages particuliers comme le don de titres.

Pourquoi créer une fondation abritée ?

S. D. : Pour le fondateur, il s’agit de construire un projet familial dans la durée, qui donne l’occasion de renforcer la cohésion entre les générations. Cela peut également concerner un groupe d’amis, un entrepreneur ou un groupement d’entreprises.

Récemment, nous avons donné la possibilité de verser la dotation minimale (200 000 €) d’une fondation abritée sur cinq ans au lieu de trois ans, en raison de l’instauration de l’IFI (soit 40 000 € par an).

Et pourquoi pas un fonds de dotation ?

S. D. : Le fonds de dotation n’a pas besoin d’être attaché à une personne morale : sa mise en place est moins « onéreuse », à partir de 15 000 €, mais cela demande du temps et de l’investissement pour le développer. A l’inverse, dans une fondation abritée, le philanthrope dispose d’un véhicule clé en main, totalement géré par nos équipes sur le plan administratif. Nous demandons aux fondations sous notre égide qu’au moins 40 % de l’enveloppe allouée annuellement soutienne des projets portés par Apprentis d’Auteuil ; à partir de 70 %, nous ne facturons pas de frais de gestion.

Quelles sont vos relations avec les cabinets de conseil en gestion de patrimoine ?

S. D. : Nous sommes encore peu connus des CGP et nous cherchons à nous rapprocher d’eux. Beaucoup n’ont pas conscience que nous disposons d’importants moyens pour les accompagner. Comme eux, nous sommes présents sur le plan national avec cinq directions régionales qui chacune dispose d’un responsable mécénat et philanthropie. Nous pouvons donc créer un lien de proximité avec le CGP et ses clients et ils peuvent financer des projets locaux et avoir un effet direct sur leur ville, leur quartier… Nous pouvons les accueillir dans nos établissements pour qu’ils prennent bien la mesure de nos actions. Il existe en France environ 500 000 emplois sous tension car non pourvus et perçus comme très exigeants : les philanthropes apprécient notre accompagnement des jeunes dans l’épanouissement d’un savoir être et l’acquisition d’un savoir-faire. L’insertion sociale est fondamentale pour leur redonner confiance, qu’ils trouvent un équilibre et qu’ils regardent l’avenir avec espérance.

Nos causes sont très largement connues et les objectifs sont partagés. Pour les CGP, offrir un service de philanthropie leur permet de consolider une relation de confiance avec leur client. Nous pouvons les accompagner via notre équipe de juristes experts sur les sujets de fiscalité des dons et de droit des successions, par exemple sur des donations, des donations temporaires de biens immobiliers ou de portefeuilles titres. Ces donations temporaires permettent d’être philanthrope sans se départir de son patrimoine et de pouvoir ensuite le transmettre à ses enfants. Parfois, nous recevons également des cessions de droits d’auteurs qui nous permettent de financer des projets artistiques pour les jeunes.

Nous intervenons parfois auprès de leurs clients, comme récemment à Rennes, et nous organisons également des événements auxquels nous invitons, par exemple, des banquiers privés et des professionnels du droit. l

 

En soutien du programme Maisons des familles

Primonial REIM soutient la fondation Apprentis d’Auteuil depuis 2014. Ce partenariat historique prend sa source dans le souhait de Primonial REIM d’inscrire très tôt son métier de gérant immobilier en rapport avec des enjeux sociétaux et les valeurs qu’elle entend promouvoir, notamment dans le domaine de la santé et l’éducation à travers sa SCPI Primovie. Ce mécénat se traduit sous forme de dons financiers, fléchés en fonction des besoins d’Apprentis d’Auteuil. Depuis près de trois ans, Primonial REIM soutient ainsi le programme Maisons des Familles. L’objectif est de contribuer à travers le financement de ce programme, au développement de lieux d’accueil, générateurs de lien social pour les familles en difficulté. 

Au-delà d’un soutien financier, les équipes de Primonial REIM s’engagent et s’impliquent dans plusieurs actions caritatives pour les Apprentis d’Auteuil :

- un Charity Day annuel qui consiste en une journée d’action dans une Maison d’enfants à caractère social spécialisée dans l’accueil temporaire d’enfants en difficulté (travaux de peinture des bâtiments, désherbage, jeux éducatifs avec les enfants…) ;

- le concours challenge connecté annuel « Je marche pour Apprentis d’Auteuil » au profit des Maisons des familles.

- et la participation au dîner de gala annuel au siège de la fondation pour un moment de partage notamment avec les autres partenaires et les bénévoles.

Stéphanie Lacroix, directrice générale de Primonial REIM, déclare : « Nous sommes fiers à travers notre soutien à Apprentis d’Auteuil de contribuer, aux côtés des autres donateurs, à améliorer le cadre de vie des enfants et des familles ».

  • Mise à jour le : 05/11/2019

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