L’impact de la Covid-19 sur le rendement des SCPI

Par : edicom

Par Pierre Garin, directeur du pôle immobilier de Linxea

Les données du second trimestre sont cruciales pour estimer l’impact de la crise sanitaire sur le marché des SCPI. Le premier trimestre plutôt positif s’expliquait en partie par le fait que les SCPI encaissent les loyers avec un trimestre d’avance.

Mais plusieurs questions restaient en suspens : quel a été le comportement des épargnants face à cette crise ? Les SCPI ont-elles pu recouvrer leurs loyers auprès de leurs locataires ? Et surtout, quel sera l’impact sur les rendements pour l’année 2020 ?

Tout d’abord la collecte nette après un premier trimestre record à 2,56 milliards d’euros (source ASPIM), a quasiment été divisée par 3 pour se situer entre 800 et 900 millions d’euros au second trimestre, un des niveaux les plus faibles enregistrés depuis le début des années 2010. Cependant, cette baisse résulte surtout d’une diminution des souscriptions plutôt que d’un phénomène de retraits massifs, ce qui témoigne de la confiance des épargnants déjà investis. Nous notons une reprise progressive de l’activité depuis la fin du second trimestre, un signe encourageant pour la collecte à venir des troisième et quatrième trimestres. Cette baisse de la collecte du second trimestre n’est pas de nature à inquiéter les sociétés de gestion car celle-ci est compensée par la « surperformance » du 1er trimestre.

Loyers : une moyenne de 78%

Au niveau des loyers, les analyses se veulent rassurantes. Le taux de récupération des loyers atteint une moyenne de 78% au second trimestre. Ce résultat est finalement très positif : les sociétés de gestion avaient envisagé des scénarios plus pessimistes face à la crise. L’hôtellerie et le commerce sont les classes d’actifs les plus affectées alors que la santé, la logistique et le résidentiel ont des taux de recouvrement proches de 100 %.

Le prix des parts se maintient

L’évolution du prix des parts de SCPI était également une source d’interrogation de la part des épargnants. A ce jour, aucune baisse du prix des parts n’a été identifiée depuis le début de cette crise et aucune société de gestion n’a communiqué sur une éventuelle baisse dans les mois à venir. La société de gestion Primonial a même pris l’initiative de faire expertiser son parc immobilier au 30/06/2020. Ces expertises n’ont indiqué aucune baisse par rapport aux expertises du 31/12/2019, et ont même révélé des valeurs en hausse sur les actifs de santé et résidentiels. Autre signal positif, deux SCPI ont récemment revalorisé le prix de leur part au cours de ce deuxième trimestre, Kyaneos Pierre (+1,92 %) et Cœurs de Régions (+0,80 %).

Le rendement prévisionnel pour 2020 se maintient à 3,98 %

Enfin, en ce qui concerne les rendements, les données de cet observatoire du second trimestre viennent conforter les analyses rassurantes du 1er trimestre. Sur les 61 SCPI auditées, la diminution des dividendes servis sur ce premier semestre reste contenue avec une baisse moyenne de 11,07 %.

En répliquant cette baisse sur le rendement global des SCPI pour l’année 2020, celui-ci s’établirait à 3,91 %. Cependant, ce scénario reste pessimiste car la plupart des sociétés de gestion envisagent une amélioration des rendements pour les troisième et quatrième trimestres notamment grâce aux reports de loyers négociés. Les rendements prévisionnels communiqués par certaines sociétés de gestion pour 2020 traduisent eux une baisse de 8,04 %, contre 9,44 % lors de notre précédent Observatoire, ce qui correspond à un rendement global de 4,05 % pour 2020. Ce scénario est lui plutôt optimiste car de nombreuses SCPI des secteurs les plus touchés comme le commerce ou l’hôtellerie n’ont pas communiqué de rendement prévisionnel, qui serait susceptible d’accentuer cette baisse.

En faisant la moyenne de ces deux rendements moyens (le plus pessimiste à 3,91 % et le plus optimiste à 4,05 %), le taux de rendement prévisionnel moyen en 2020 pour les SCPI serait de 3,98 %, ce qui confirme nos prévisions du trimestre précédent. 

Des inquiétudes persistent

Avant de conclure, il faut garder à l’esprit que nous ne sommes qu’à la moitié de l’année et que de nombreuses incertitudes persistent sur le plan sanitaire et économique. Les aides mises en place par l’Etat comme le chômage partiel, les PGE (prêts aux entreprises garantis par l’Etat) que les entreprises ne commenceront à rembourser que l’an prochain ou encore les fonds de solidarité ont probablement permis d’atténuer l’impact à court terme de cette crise. Cependant, il y aura probablement des « dommages collatéraux » à plus long terme et d’après le FMI, la récession devrait atteindre -10,2% en France en 2020, ce qui doit nous inciter à la prudence.

En conclusion, cette situation inédite a été un stress test grandeur nature pour les SCPI obligées de faire face à des circonstances exceptionnelles et le résultat est plus que rassurant. Avec un taux de rendement qui pourrait s’établir aux alentours de 4 % en 2020, la SCPI pourrait plus que jamais s’affirmer comme une valeur refuge en temps de crise.

 

Le taux de recouvrement des loyers par classe d'actifs

 

 

Dans le détail

Au 1er trimestre 2020, sur les 61 SCPI étudiées par l’Observatoire des SCPI de Linxea, seules 10 d’entre elles, soit 16 %, affichaient une baisse de leurs dividendes supérieure à 20 %. A l’issue du second trimestre, elles sont 7 de plus soit 28 % à afficher une baisse de plus de 20 %. Au 1er semestre 2020, 72 % des associés des parts de SCPI ont donc continué à percevoir une distribution de loyers globalement satisfaisante. Afin d’affiner cette analyse, il nous a paru pertinent de raisonner par classe d’actifs.

Le bureau

Le bureau a encore démontré toute sa résilience durant cette crise avec un taux de recouvrement des loyers de plus de 80 % (81,59 %) et une baisse moyenne des dividendes sur ce 1er semestre de seulement 6,18 %. Si le confinement a permis de mettre en exergue l’efficacité du télétravail, il a aussi mis en évidence ses limites. Il y aura probablement une augmentation du télétravail dans les années à venir, mais cela restera plutôt un télétravail partiel à raison de quelques jours par mois. La notion d’usage dans ce secteur sera déterminante et il faudra probablement adapter les espaces avec plus de services aux locataires, de configurations différentes (distanciation sociale) et de flexibilité vis-à-vis des locataires.

Il est également plausible de voir dans les années futures le développement de « tiers-lieux » à l’extérieur des grandes villes, de taille plus réduite et plus proches des lieux d’habitation de certains salariés.

Le commerce

Avec un taux de recouvrement des loyers de 65 % en moyenne et une baisse des dividendes autour de 18 %, nous pouvons dire que le commerce a su résister face à la crise. Les commerces de périphérie, les centres commerciaux et les retail parks n’ont pas connu le même sort que les commerces de proximité en centre-ville et plus précisément les commerces d’alimentation. La baisse de fréquentation de ces premiers a été bien plus importante.

Depuis la fin du confinement, la fréquentation n’est pas encore revenue au niveau d’avant-crise, mais l’on constate tout de même une hausse du panier moyen. L’enjeu est de savoir si l’épargne accumulée pendant le confinement (+15 % au second trimestre) sera consommée par les ménages au cours des prochains mois. Les opportunités d’acquisition pour les SCPI de commerce seront nombreuses dans les prochains mois, mais ces dernières seront sans doute encore plus soucieuses de la qualité des emplacements et de la solidité financière des locataires.

Les diversifiées

La diversification a joué son rôle en période de crise avec un taux d’encaissement des loyers de 79% en moyenne et une baisse moyenne des dividendes de 8,38 %. A noter que 50 % des SCPI « diversifiées » affichent un dividende en augmentation ou avec une baisse contenue à - 5 %. Des SCPI comme Vendôme Régions ou Néo ont même annoncé des rendements prévisionnels de 6 %, voire 6,25 % pour la SCPI Cœurs de Régions.

Les spécialisées

L’impact de la crise sanitaire n’a pas été le même selon la thématique des SCPI. Les SCPI de santé et de logistique n’ont quasiment pas été affectées avec des taux d’encaissement des loyers proches de 100 % et des rendements stables.

Concernant la santé, attention cependant à ne pas tirer de conclusions hâtives, car une crise économique pourrait bien impacter ces actifs - renonciation aux soins par les particuliers, difficulté à financer des locations en Ehpad pour les familles.

Concernant la logistique, les perspectives sont très positives car les loyers en France sont inférieurs à ceux des voisins européens. Le confinement a également accentué l’essor du e-commerce.

Le secteur hôtelier est, au contraire, le secteur le plus sinistré par la crise avec une baisse moyenne de 48,61 % de ses dividendes. Cela est logique dans un contexte où ces SCPI ont vu la quasi-totalité de leur parc immobilier fermer pendant ce trimestre. Malgré le peu de données communiquées sur le recouvrement des loyers, nous pouvons penser qu’il s’agit de la classe d’actifs ayant eu le taux de recouvrement le plus faible.

Cependant ces SCPI possèdent des fondamentaux qui devraient leur permettre de rebondir avec des baux longs et des locataires solides. La SCPI Atream Hôtels a, par exemple, annoncé un rendement prévisionnel pour 2020 de 2,75 % et ambitionne un retour à des rendements d’avant-crise dès 2021. De plus, des expertises immobilières effectuées sur d’autres actifs de son portefeuille lui permettent d’estimer que son prix de part devrait rester stable. A titre de comparaison, un épargnant qui aurait également investi au 1er janvier 2020 dans le secteur de l’hôtellerie en achetant des actions du groupe Accor, 1er groupe hôtelier européen, aurait perdu à ce jour plus de 45 % de son capital initial.

Le résidentiel

Ces SCPI ont été peu impactées par cette crise, grâce notamment au mécanisme de chômage partiel qui a pu aider les locataires les plus vulnérables. On note cependant une baisse des dividendes de l’ordre de 10 %, mais une SCPI comme Kyaneos Pierre a tout de même annoncé un rendement prévisionnel compris entre 6 % et 6,5 % pour 2020.

 

 

 

 

 

 

 

 

  • Mise à jour le : 27/08/2020

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